Port Barton

1 janvier 2017


Port Barton - 11 heures du matin : 

Tobby le chien fait sa ronde quotidienne au bord de l’eau.

À quatre pattes, il trotte sur le sable d’une cadence décidée. La plage est son terrain. Il s’y déplace sans se faire distraire par le paysage de carte postale qui l’entoure : du sable blanc et fin, une mer calme qui de son murmure continu berce les quelques touristes sur son rivage étendus et sculpte ce rivage en une promenade digne d'un de ces calendriers aux paysages insulaires énervants... Les palmiers hauts et fiers qui surplombent la plage distraient encore moins Tobby. Ils offrent un peu d’ombre aux vacanciers rosés. Tobby ne prête pas non plus attention aux ébats des enfants qui jouent dans l’eau gaiement, ni à Dondon, son pote tout poilu d’enfance, un peu grassouillet à présent, qui tente de se lever, s’étire pour se recoucher sur son autre flanc. Exercice de la journée. Il ne considère pas non plus Tito, qui lézarde un peu plus loin, et, de son pelage beige, se mimétise avec le sable dans lequel il a creusé un trou bien frais. Tobby, imperturbable, trotte. 

Dans sa ronde matinale, quelque chose attire pourtant son attention : une irrégularité. Une irrégularité dans le paysage habituel. Là, sur la plage, quelque chose qui ne tourne pas rond. Quelque chose qui n'est pas à sa place...

Il s'arrête alors.
Regard à gauche.
Regard à droite.
Inspection.

Seule sa malheureuse queue en tire bouchon trompe son état d'alerte. Malheureuse queue. Depuis le temps, il s'y est habitué, mais cela ne change rien au fait que, quel que soit son état, son petit attribut tout poilu et tout recourbé lui confère un sérieux côté bouffon.

Ce matin, Tobby était donc en train de tranquillement se dandiner lorsque, STOP, quelque chose d'inhabituel arrête sa trotte.

Arrêt sur image.
Regard à gauche.
Regard à droite.
Inspection.
Là ! L'irrégularité est là !
Juste à ses pattes, à côté desquelles se dresse une structure de sable récemment travaillée : trois petites buttes, (des châteaux de sable en langage humain). Mais à Tobby, ce genre d'écart paysagiste, ça ne lui plait pas ! La plage est son terrain. Il doit faire quelque chose !

Oreilles tombantes, quatre pattes posées, museau fixé sur ces trois protubérances, queue (encore) en tire-bouchon, il les fixe.
Toute son attention est mobilisée. Méthodiquement, il lève alors la patte avant. Et détruit une première tour. (Il est droitier). Il fait alors le tour de la structure à présent boiteuse. Un tour. Demi tour. Un tour. S'arrête à nouveau devant la structure. "La plage est mon terrain, et cette chose ne me plait guère !"

Oreilles tombantes, les quatre pattes bien ancrées dans le sable fin (dont une un peu plus ensablée à présent), museau posé sur ces deux protubérances, attribut canin (encore et toujours) en tire bouchon, et il fixe. Préméditation de la récidive. Il lève alors la patte avant. Et, POC. Destruction du deuxième ouvrage d'art. (Tiens, Tobby est ambidextre). Apparemment satisfait, il reprend son chemin.

Tranquillement, comme si de rien était, il trotte sur le sable d'une cadence décidée...
... alors que la nature reprend son souffle : la mer et son murmure, les touristes changent de flanc pour compléter le bronzage, les palmiers, Dondon, Tito qui lézarde, les enfants jouent, le soleil, les baigneurs et ... Et Tobby !???! ...

Tobby est de retour...
... sur ses quatre pattes, il trotte sur le sable d’une cadence décidée. Imperturbable, il semble savoir exactement où se diriger. Le rivage a la texture parfaite d'un de ces calendriers aux paysages insulaires entêtants : les traces de ses petites pattes restent en effet bien imprimées dans le sable salé ... Patte avant droite, avant gauche, arrière droite, arrière gauche, oreilles tombantes qui rebondissent  sur son crâne poilu au rythme des pas, museau fixé vers une direction précise, tire-bouchon qui dandine ...

D'un coup sec, il s'arrête. Malheureuse petite structure humaine. Il lève la patte avant droite et POC ! "Là ! Bien fait, ouvrage détruit" (Peut être en fin de compte est-il droitier...) Un tour, deux tour, demi tour, encore un tour. Tobby lève la patte ... arrière droite cette fois. (Ça se dit tridexstre ???)  ... et ... PSSSSS ... "là ! Là à présent c'est à nouveau mon territoire !". Satisfait il repart alors. À quatre pattes, il trotte sur le sable d’une cadence décidée. Débarrassé des écarts paysagistes, la plage est à présent à nouveau son terrain. Effacée toute autre trace de tentative de colonisation... il rejoint alors son ami Dondon ...


(Récit basé sur une histoire vraie ... !!)

Tobby au milieu en arrière plan avec son pelage noir
Tobby et Dondon
Port Barton. C’est un peu comme un trésor. Il faut le chercher pour le savourer, la route pour y arriver est tortueuse, non asphaltée par endroits et accidentée par les intempéries. 
Nous sommes arrivés à Port Barton depuis la junction San Jose, après près de trois heures de vélo dans un décor magnifique. Pourtant, le trajet n'avait pas commencé dans les meilleures conditions : après quelques kilomètres, une vieille dame qui trainait sur le bord de la route se jette en effet sur le vélo de soso ... plus de peur que de mal nous reprenons plutôt vite la route; mais un peu moins vite nos esprits ... heureusement le paysage s'occupe très vite de ravir notre attention et mobiliser nos muscles car il n'est pas si évident que cela : on doit passer de l'autre côte de la petite montagne qui nous sépare de la cote ...
pause sur la route ...
nous avons atteint le point de plus haut et nous apercevons la baie de Port Barton là bas en contrebas
Nous arrivons à Port Barton en même temps que l'obscurité. Et, dès le premier regard, ce petit village entre mer et montagne nous enchante. C'est le coup de coeur, et à aucun moment de notre séjour nous déchantons. Car Port Barton c’est tout ça : merveilles sous l’eau, ciel bondé d'étoiles au-dessus de nos têtes, s’endormir le soir bercés par les vagues, se faire réveiller par ces mêmes vagues au matin dont le murmure se mêle aux rires des enfants qui jouent dans l'eau, c'est lever les yeux au ciel la nuit tombée et sentir sa tête tourner par le trop plein d'étoiles, s'asseoir dans le sable et compter les étoiles qui filent. Port Barton c'est la tranquillité de ses rues mal éclairées, non asphaltées, illuminées par endroit par les quelques établissements parsemés d'ici là. C'est la promesse d'un tourisme grandissant et la prière pour que cela se passe dans le respect ... dans le respect de cette nature encore préservée et des habitants qui aujourd'hui vivent en apparente syntonie avec les touristes et les étrangers venus tenter leur chance d'entreprendre.

Port Barton - la plage côté sud
Pourtant Port Barton a bien changé depuis trois ans. Ou plutôt, elle a évolué. Soso se souvient d'un seul restau dans le village et de quelques uns dans divers hôtels au bord de l'eau. Seul un établissement avait la connexion internet et les hôtels et guesthouse se concentraient au bord de l'eau. À présent, les établissement - hébergements et restaurants - s'étendent sur trois niveaux de rues derrière le niveau plage. Aussi, nous voyons des constructions en cours un peu partout. Ça évolue. Ça va évoluer. Ce qui préserve encore Port Barton d'une croissance touristique trop rapide et de masse, c'est d'une part la difficulté d'accès (mais la route va très bientôt être finalisée ...) et, d'autre part, les commodités telles que l'électricité qui n'est disponible pour la plupart des établissements qu'entre 17h et minuit, la manque d'hôtels de luxe ... Espérons en une évolution à rythme humain ... nous avons tellement apprécié le fait de pouvoir nous promener tranquillement sur une belle plage non bondée, de passer des soirées festives dans un petit recoin de la plage alors que le reste de celle-ci pouvait s'assoupir sous le regard bienveillant des étoiles. Qu'il était magique le tour pour faire du snorkeling sur une petite bangka avec seulement deux autres touristes ! ... À la découverte de fonds marins magnifiques et de tortues de mer qui semblent aussi zen que les habitants de Port Barton ... où nous avons laissé un petit peu de notre coeur ... 

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